Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

clair de jour

  • La Jeune détective et autres histoires étranges - Kelly Link

    De ce côté de l’atlantique il s’agit bien pour la majorité des lecteurs de « découverte », puisque hormis dans des revues spécialisées de science-fiction, il était jusqu’alors impossible de lire ces textes. Récompensé par le Prix James Tiptree Award en 1997, dés la parution de Voyages avec la femme des neiges, Kelly Link fait aujourd’hui figure de référence dans le domaine du fantastique à tendance onirique et horrifique. Les multiples récompenses glanées par l’écrivain depuis quelques années le prouvent (Prix World Fantasy en 1999, Nebula Award en 2001, Hugo Award en 2005 et Nebula Award en 2006, etc.)

     

    Une reconnaissance méritée, qui vient couronner un univers, une écriture et une voix vraiment singulière dans le milieu de la « SF » contemporaine (au sens large).  . Ses nouvelles gentiment morbides résonnent en nous comme de mauvais rêves au petit matin. L’auteur semble puiser dans l’inconscient collectif, mélangeant chimères, relectures très personnelle des grands mythes de l’humanité ou adaptations moderne des contes sinistres de Hans Christian Andersen (Voyages avec la femme des neiges faisant évidemment référence à La Reine des Neiges, mais aussi plus étrangement, à Cendrillon) et des histoires non moins cruelles d’Hoffmann ou Edgar Allan Poe.

     

    Mais Kelly Link cultive avant tout un style résolument contemporain (exception faite du très british « Chapeau du Spécialiste » qui n’est pas sans évoquer le film Les Autres d’Alejandro Amenabar , ou « Leçon de Vol » et sa cohorte de dieux et demi-dieux) ce qui déplace en quelque sorte, son monde fantasque et fantastique dans le domaine obscur et inquiétant des légendes urbaines, des déambulations éveillés de l’adolescence et des songes de l’enfance. On trouvera aussi beaucoup de points communs avec les auteurs inclassables de la littérature générale. Ainsi, « Nymphéas, Lilas, Lilas, Iris », rapelle Ainsi vivent les morts de l’anglais Will Self, « Leçon de magie pour débutant » malgré son titre à la Harry Potter fait immanquablement penser aux textes des Légendes d’automne de Ray Bradbury, « Le sac à main féerique » et « Peau de chat », ne sont pas loin du Neil Gaiman de Neverwhere, Animaux de pierre est un clin d’œil à Lovecraft, quant à « Plan d’urgence anti-zombie », avec son évocation nocturne d’adolescents aisés, laissés à eux même par leurs parents irresponsables, il semble faire un autre clin d’œil, à Mais qu'est-ce que tu fais là tout seul ? de Pierre Szalowski

     

    Au final, avec La Jeune détective et autres histoires étranges nous poursuivons notre découverte de cette littérature « transgenre », que d’aucun nomme joliment transfiction. Un terme proposé par Francis Berthelot pour qualifier des textes qui n’entre ni vraiment dans le domaine de la science-fiction, ni réellement dans celui de la littérature générale. Une chose est sûre, ce recueil ravira les amateurs de littérature étrange (c’est le moins avec un titre pareil), de fantastique décalé ou encore les lecteurs de Jacques Barbieri ou de Jeff Noon, ou Lettres choisies (1957-1969) de Jack Kerouac avec qui Kelly Link partage également, bien des points communs.

  • Avis sur Noir c'est noir de Tim Lane

    Noir c'est noir de Tim Lane.jpg Nouvelliste d'origine, Tim Lane déplace son talent littéraire vers la BD : avec la puissance graphique d'un Charles Burns, son premier recueil d'histoires courtes sonde le mal-être des parias de l'Amérique, sous le double signe de la Beat Generation et du rock'n'roll. Noir c'est noir...

    ... « Y a plus d'espoir », comme dirait ce bon vieux Johnny. Sauf que Tim Lane a du goût, préfère Elvis, et qu'en VO, son recueil d'histoires courtes s'intitule Abandonned Cars. Cela dit, le titre Noir c'est noir en VF résume parfaitement le ton désenchanté de cette somme de « graphic stories ». D'abord écrites sous forme de nouvelles - fait assez rare pour être souligné - les récits de Lane n'ont pris forme visuelle qu'ensuite.

    Dès les premières pages de l'ouvrage, on reconnaît la palette d'influences : l'atmosphère de film noir chère à Will Eisner, la puissance de trait en noir et blanc de Charles Burns (Black Hole), la concision narrative d'Adrian Tomine. Fasciné par les romans baroudeurs de la Beat Generation, Tim Lane raconte dans « Spirit » (hommage à Eisner) comment il a cherché à suivre les traces de Jack Kerouac : en prenant le train. Sur des planches magnifiquement contrastées, au son de « Mystery Train » d'Elvis Presley, Lane narre l'errance clandestine d'une jeune apprenti écrivain, l'euphorie libératrice d'un Clochard Céleste terré dans un wagon de marchandises.

    Présent dans trois short stories, Spirit est l'un des personnages le plus directement autobiographiques créés par Lane, le plus positif aussi : même dérisoire, sa quête de liberté atteint au sublime. Car pour le reste, Noir c'est noir dessine une carte du pied-tendre américain totalement désespérée. « Par ici les gars ! » assène un rabatteur de cirque, dès la première page, « Venez par ici ! Entrez dans un monde de folie ! Vous allez vous amuser ! » Caustique, Lane invite à faire un tour dans son freak show underground : celui de la banalité.

    Ainsi, on croise aussi plusieurs fois John, 38 ans, seul dans l'obscurité d'une existence vide de sens, depuis que sa femme Katie l'a quitté. « On m'a appelé comme ça à cause de quelqu'un d'important. . Pour s'oublier, il alterne bagarres et virées nocturnes. Quand sa voiture le lâche par une soirée pluvieuse, on le voit courir trempé au milieu de nulle part, en plan large : la route ressemble alors à un calvaire moderne, avec des pylônes électriques en guise de Croix. Chacun sa croix, sur la route fantôme. Puis, plus loin, on fait connaissance avec le « maniaco-dépressif d'une autre planète », qui se présente en ces termes : « Ma mère a œuvré pendant 52 heures avant que je sorte. Finalement il a fallu se servir de pinces. Clairement je n'avais rien à foutre dans ce monde. »

    Pas très gai tout ça : Tim Lane décrit le versant sombre de l'Amérique, son ambivalence de toujours. La face violente et cachée de l'usine à rêve : ironiquement pris en sandwich entre deux portraits géants de Marlon Brando (beau comme un Michel-Ange côté face, vieux et empâté côté pile) le recueil est émaillé de fausses pubs rétro et enfantines, avec un personnage recto-verso à découper (par exemple, un « cut out » de flic : bad cop d'un côté, good cop de l'autre), et jalonné d'apartés cyniques sur l'absurdité de la société moderne. Armé d'un trait dense et d'un verbe magnétique, Tim Lane tranche dans le vif de l'Amérique, extrayant d'un abîme d'encre noire les silhouettes détrempées (mais dignes) de ses rebuts de la société. Seul échappatoire dans cet enfer existentiel : tailler la route.

    Tim Lane, Noir c'est noir, éditions Delcourt, coll. Outsider, 2009. 

  • Avis sur le roman : Anges et Démons de Dan Brown

    Anges et Démons de Dan Brown.jpg L'histoire d'Anges et Démons 

    Le CERN, grand centre scientifique européen situé en Suisse, est le théâtre d’un meurtre des plus étranges. Le physicien Leonardo Vetra, qui faisait des recherches sur l’anti-matière, est retrouvé mort assassiné, avec un étrange symbole, un ambigramme, gravé au fer rouge sur sa poitrine. Le spécialiste en symbologie religieuse et professeur à Harvard Robert Langdon est dépêché sur place. En effet le symbole retrouvé sur le cadavre fait référence à une antique confrérie secrète : les Illuminati. Est-ce que cette secte, créée par Galilée, ressurgirait-elle aujourd’hui ? Et dans quel but ? Pendant ce temps-là, au Vatican, s’organise l’élection en conclave d’un nouveau pape. Mais quatre des favoris à la succession au saint siège disparaissent mystérieusement. Tout indique que les Illuminati se cachent derrière tout cela.

    Avis sur ce roman historique


    Ce bon roman historique écrit avant le célèbre best-seller Da Vinci Code (The Da Vinci Code, 2003), où apparaît d'ailleurs le même personnage principal, mais paru en français que après (en 2005), est lui-même très vite devenu un best-seller largement commenté. Et ce succès en ventes est d'un côté largement mérité. D’abord Dan Brown a un style d’écriture et une façon de mettre en scène son intrigue terriblement efficace et habile. On ne s’ennuiera pas une seconde dans cette course-poursuite haletante au dénouement spectaculaire. De plus il parle de sujets visiblement très à la mode : les confréries secrètes et les secrets du Vatican. J’ai également apprécié la façon qu’avait Dan Brown de confronter les sciences et la religion (le Vatican est le siège du catholicisme par rapport au CERN qui semble être la cathédrale des sciences). Deux mondes s’opposent, celui de la raison scientifique et celui de la croyance.

    Dan Brown tourne son (quand même !) grand savoir en vue de servir l’intrigue, n’ayant pas peur de modifier certaines choses. En effet, par exemple le CERN dépeint dans le roman ne correspond pas tout à fait à la réalité et l’histoire de la confrérie des Illuminés est un peu déformée. Certes Anges et Démons, tout comme Da Vinci Code   d’ailleurs, n’est pas un livre d’histoire mais bel et bien une œuvre de pure fiction.

    Mais pas tout n’est parfait, loin de là. On regrettera que finalement derrière ce contexte religieux et scientifique plutôt alléchant se cache finalement une intrigue qui se déroule de façon assez conventionnelle. Tous les clichés interviennent : la jolie fille, le méchant mystérieux, les meurtres tous très horribles et un final à tiroir avec beaucoup de revirement et de grosses explosions qui frise l’absurde et mettant en scène un ennemi qui balance tout son plan au héros en mauvaise posture avant que celui-ci ne s’en sorte par un coup de quasi magie. De plus le style de Dan Brown est certes très efficace pour mettre en place le suspense, mais parfois son écriture est un peu légère.

    Donc Anges et Démons est un polar historique restant conventionnel mais très efficace, au contexte intéressant même si celui-ci est parfois détourné. Un excellent livre de vacances pour se détourner un peu l’esprit, mais sans plus.


  • Avis sur Any Place I Hang My Hat de Susan Isaacs

    Amy Lincoln, l'héroïne de Any Place I Hang My Hat, a grandi sans parents. Elle était un nourrisson lorsque sa mère est partie et son père a passé la majeure partie de son enfance en prison. Sa grand-mère, une cireuse de jambes à temps partiel qui volait le dîner à l'étalage, était sa tutrice légale, mais Amy s'est surtout élevée toute seule. Après une bourse d'internat, Harvard et l'école de journalisme de Columbia, Amy a surmonté ses origines modestes pour évoluer parmi les riches et les puissants. Travaillant comme journaliste politique, elle assiste à un événement de campagne pour un candidat à la présidence lorsqu'un homme se présente en prétendant être le fils hors mariage du candidat. Amy aide le jeune homme, et sa filiation douteuse l'incite à enquêter sur son propre passé, découvrant des surprises sur sa propre famille.

    Le roman de Susan Isaacs a reçu des critiques plutôt positives, le Seattle Times déclarant : "Any Place I Hang My Hat est plein de dialogues vifs et de répliques pleines d'esprit, mais c'est un livre qui a de la substance et un grand cœur - une rareté à notre époque où les romans féminins sont dominés par la chasse au mari superficielle et le shopping de créateurs."

     

    Any Place I Hang My Hat de Susan Isaacs, 2004

     

     

  • Critique de La bête qui meurt de Philip Roth

    la bete qui meurt.JPG David Kepesh, âgé de 62 ans, est un homme en fin carrière, qui enseigne encore la littérature à l'université et qui a créé une émission de télévision. Même s'il donne de moins en moins cours il garde cependant la même popularité auprès de ses étudiants, et plus particulièrement auprès des étudiantes. Un jour il distingue une certaine Consuelo, une ressortissante cubaine âgée de 24 ans issue de la haute société. Il va la séduire, qui va le fasciner par son corps merveilleux. Il va alors connaître une véritable passion, lui qui ne s'attachait surtout à personne, et connaître la jalousie, la peur de la perdre... Le pire sera lorsqu'il se rendra compte, qu'elle même ne le désire pas réellement.

    La bête qui meurt est écrit sous la forme d'un long récit, voire d'un monologue, adressé par Kepesh à un ami ou autre. La trame est plutôt classique. On suit l'évolution progressive du déséquilibre passionel qui prend possession du narrateur. Car déséquilibre il y a : le désir se relèvra définitivement non partagé. Le rythme est soutenu, vivant, perscutant. Du pur Philip Roth ! même si la forme de ce récit est fort différente (forme en monlogue, nouvelle,...) de ce que l'on retrouve habituellement chez lui. Comme souvent une place importante est donnée à l'introspection des personnages. Mais par les souvenirs de Kepesh, Philip Roth nos relate finalement toute une époque, celle de la découverte et de la liberté sexuelle, mais aussi le passage d'un personnage qui traverse cette époque, alors que petit à petit il s s'esouffle et se meurt. Attention cependant, certains passages sont très crus et pourraient déranger certains lecteurs. Il est à signaler que le personnage de David Kepesh est déjà apparu dans deux autres romans de Philip Roth: Le Sein (The Breast, 1972) et Professeur de désir (Professor of Desire, 1977).

    En bref La bête qui meurt est un très beau roman de la part d'un auteur qui démontre ici à nouveau son immense talent.

     

    La bête qui meurt,  Philip Roth,  Gallimard , 2001 

     

  • Avis sur : Le plus beau des voeux d'Alyson Noël

    Le plus beau des voeux d'Alyson Noël.JPG Le plus beau des voeux est un roman contemporain amusant qui répond à l'éternelle question de savoir ce qui se passerait si les souhaits devenaient réalité.

    L'histoire suit le personnage principal, Nick Dashaway, qui fait des vœux pour avoir une existence plus cool - littéralement. Il en a assez d'être ignoré et d'être considéré comme un gros nerd par ses camarades de classe. Nick pense que sa grande chance de tout changer est sur le point de se produire lorsque Josh Frost, la superstar des adolescents, vient en ville pour juger le concours de talents du collège. Nick est persuadé qu'il peut gagner - et ensuite se transcender dans la foule cool - où il a sa place. Mais tout lui explose à la figure. Le seul espoir qui reste à Nick est d'utiliser son vœu d'anniversaire ou l'envoi d'une ecard pour changer sa vie - et il se réalise. Mais la vie parfaite dont il rêvait est loin d'être celle qu'il reçoit, et le lecteur peut vivre et apprendre de toutes ses erreurs en même temps que lui.

     

    Nick est un excellent personnage principal. Il est facile de s'attacher à lui dès le début de l'histoire, et même si je suis beaucoup plus âgée que lui, j'ai trouvé que je pouvais compatir à ses problèmes sans problème. L'auteur dépeint Nick de manière réaliste, avec ses obstacles d'adolescent, ses mauvaises attitudes, ses pensées et actions méchantes, et d'autres types d'angoisses d'adolescent. J'ai trouvé que certaines des choses que Nick pensait et disait étaient assez cruelles et même grossières à certains moments, mais je suppose que j'oublie simplement les pensées réelles des enfants à cette époque. En outre, l'auteur a probablement voulu que nous trouvions que certaines des choses faites et dites étaient erronées, afin que Nick et le lecteur puissent en tirer des leçons plus tard dans l'histoire. En dehors des aspects fantastiques évidents de l'intrigue, le livre était terre à terre et plein de grandes leçons.

    J'ai adoré la façon dont le voeux de Nick s'est réalisé, mais il se rend compte que les choses ne seraient pas ce dont il rêvait si les choses se passaient de cette façon. L'auteur présente de merveilleuses situations de la vie réelle dont le lecteur peut s'inspirer et qu'il peut appliquer à sa propre vie, parallèlement à la course folle dans laquelle se trouve Nick. Je vois très bien ce roman être transformé en un film fantastique !

    Je le recommande vivement aux fans du genre ainsi qu'aux lecteurs qui apprécient un bon mélange de contemporain et de fantastique, surtout pour les voeux de fin d'année !

     

    Le plus beau des voeux d'Alyson Noël, Michel Lafon, 2017